Entretien Exclusif: Raibed & Fatiha – Fondateurs de Pap et Pille

C’est à la terrasse d’un restaurant du centre commercial « Anfa Place Mall» sur la corniche de Casablanca que j’ai retrouvé Fatiha et Raibed accompagnés de leurs 2 enfants et de 2 autres entrepreneurs marocains. Ce fut un plaisir pour moi de rencontrer ce couple d’entrepreneurs venus en vacances au pays du Roi Mohamed VI, qui « Ne lâche rien » et qui a fait de l’audace leur Leitmotiv. Entretien… 

Pouvez-vous nous raconter votre parcours avant la création de Pap & Pille ? Comment en êtes-vous venus à vous lancer dans l’aventure de la biscuiterie ? 

L’histoire de Pap & Pille est avant tout une histoire d’amour. En effet, c’est ma rencontre avec Fatiha qui a bouleversé ma vie et qui a bouleversé aussi la sienne (je crois rire…) et c’est là qu’on s’est poussé à devenir des entrepreneurs. Quand j’ai rencontré Fatiha, je ne la connaissais pas du tout, j’étais venu faire des cours à son école et au bout d’une heure de temps, j’ai eu un coup de foudre et je l’ai demandé en mariage au bout de 5 jours. J’ai été pris d’amour pour cette femme, la preuve ça fait 9 ans que nous sommes ensemble avec 2 enfants. Au bout de 15 jours, on était marié devant le maire. A partir de ce moment-là, il lui restait 2 mois pour finir ses études et je lui ai dit : « écoute comme on ne se connaît pas, on va apprendre à se connaître en faisant le tour du monde ». On a commencé à voyager au bout du monde pendant 3 ans. Ainsi, on a fait le tour du monde, on est allé à la rencontre des gens ; il faut dire qu’à la base moi je suis cuisinier de formation avant d’être infirmier et elle fan de pâtisserie. On a cuisiné, pâtissé avec plein de gens autour de la planète c’était un vrai régal. Fatiha est tombée enceinte donc en 2017, elle devait donc accoucher, il lui restait 2 mois, elle s’ennuyait, le temps était long donc elle a eu l’idée de créer une page Facebook où elle vendait des pâtisseries, des plats et aussi des recettes du monde qu’on avait récoltées ici et là. A ce moment-là, ça a fait le buzz très rapidement, les gens aimaient, il y avait une vraie base clientèle. Ainsi, un couple nous a contacté, il voulait qu’on leur fasse des biscuits du monde pour leur mariage et à ce moment-là           nous avons eu l’idée de prendre les biscuits du monde qu’on connaissait et d’en faire des petites billes de biscuits. On a eu cette idée-là parce qu’une de nos filles étaient sur le plan de travail assise en train de sucer un pop-corn et on s’est dit : « C’est ce format qu’il nous faut pour Pap & Pille », alors on a fait les billes et après on a appris à devenir des entrepreneurs. 

Comment en êtes-vous arrivés à vous lancer dans l’aventure industrielle. En sachant qu’entre l’idée de base et l’implémentation d’une usine, il y a un long chemin à parcourir ? 

Effectivement, après avoir fait le mariage ils nous ont dit c’est génial est-ce que vous pouvez faire ça pour une amie ? On s’est dit on tient quelque chose qui a l’air de faire plaisir aux gens.  On s’est donc dit qu’on allait mettre en place un business et on est allé à la chambre de commerce et d’industrie leur demander comment monter un Business en France. Et là, la personne nous dit que nous devons faire un business plan. A ce moment-là je ne sais pas ce qu’est un Business plan. On va donc voir un expert-comptable, il nous dit : « C’est génial mais comment vous produisez ? » On lui dit que nous produisons manuellement et il nous dit qu’il faut que nous allions voir des sous-traitants pour qu’ils produisent pour nous. On appelle toutes les biscuiteries en France, en Angleterre, en Europe même les grands comme Mondelez mais ils ne savent pas faire les billes. Là on a deux choix le premier choix c’est soit on arrête on ne se prend pas la tête, sinon on fait de la recherche et développement et on cherche la solution pour pouvoir produire nos billes de biscuits nous-même. Comme ma femme c’est un peu Mc Giver à la maison, donc elle a dit : « non on ne lâchera pas ».  On a commandé des machines qui faisaient autre chose, on a bricolé on les a mis ensemble et au bout de 8 mois on arrive à façonner une bille de biscuit de manière manuelle avec ça, on y met un moteur et on va voir l’expert-comptable, on calcule les rendements il nous dit c’est bon : vous avez la machine, vous avez le produit, vous avez la marque. On est allé voir les banques en leur disant : « écoutez, là on a besoin de cash et besoin de soutien pour pouvoir monter la première usine de production en France ».  Ils nous disent : « ouais vous savez on n’y croit pas trop », on est allé voir la région ils nous ont dit non il faut que les banques vous soutiennent d’abord.  Comme Fatiha et moi on est issu d’une famille modeste je me suis dit je ne peux pas demander 100 000€ à mon père, Il m’aurait dit : « ça ne va pas toi de me demander 100 000€ ? » Du coup on était bloqué et on était toujours dépendant des autres pour pouvoir s’élever socialement. Et ce jour-là on s’est regardés Fatiha et moi, comme on avait une histoire commune : Parce que je suis né handicapé, parce que les gens ne croyaient pas en moi, il a fallu que je pousse, et Fatiha aussi elle est issue d’une famille de 9 enfants : pas toujours à manger à table, obligée d’aller des fois au resto du cœur, on se regarde et on s’est dit on va vendre notre maison pour pouvoir financer notre projet, monter une usine et montrer au reste du monde que vous avez eu tort de ne pas croire en nous.  

Et là on a fini l’usine en août 2019 et on a commencé à vendre les boîtes de biscuits autour de la maison.  Et les ventes commencent à grimper : on devait faire à la base 2000€ le premier mois, on en a fait 10 000, le 2e mois on a fait 11 000€ et là les banques ont commencé à nous aimer, Ils ont dit « ils n’avaient pas tort ces petits-là » et les régions aussi ont commencé à vouloir nous aider. Et il s’est passé un truc marquant dans notre histoire. C’est que je vais au salon des entrepreneurs à Lyon et je vois un responsable politique de notre région qui s’appelle Laurent Wauquiez, il disait aux journalistes : « on est là pour aider les entrepreneurs, pour les soutenir financièrement etc. » Et là je vais le voir devant les caméras et je lui dis : « ce n’est pas vrai vous êtes un menteur. Regardez notre histoire personne ne nous a aidé ». Là, il me prend à côté il me dit : « dis-moi qui tu es, raconte-moi ton histoire ». Je lui raconte notre histoire il me demande ma carte, 2 jours après on va le voir à Lyon il nous reçoit avec son équipe opérationnelle et on ressort avec 150.000€ de subventions pour nous aider à semi-automatiser nos lignes de production.  A ce moment-là on s’est rendu compte qu’en fait on pouvait accélérer les procédures. On pouvait passer par-dessus les décisions des personnes qui selon nous n’étaient pas justes.  On passait par-dessus et on redescendait au lieu de perdre du temps en bas. Et dès qu’on a compris ça : « tu connais la liste des gens qu’on est arrivé à choper directement », autant on a parlé aux acheteurs de Monoprix, au PDG de Total Energies, au président de la République etc. A partir de là, je n’ai plus laissé personne s’ériger entre eux et moi, je les ai juste chopé directement pour pouvoir atteindre mes objectifs. A ce moment-là tout allait bien, on commençait à avoir du super chiffre et la COVID est arrivée. Comme on est infirmier, on a été réquisitionné pour aller aider les Françaises et les Français, on a été obligé d’abandonner la boîte. En plus les magasins ne commandaient plus donc on a eu une chute du chiffre d’affaires. On devait payer les machines, le personnel, c’était horrible. Et là, Fatiha a eu l’idée de lancer un site de vente en ligne : de vendre aux gens en ligne des biscuits et on est allé voir des influenceurs pour nous aider à en parler mais on avait besoin de cash il a fallu qu’on fasse une levée de fonds. Du coup on est allé voir BFMTV pour faire une interview (comme je fais avec toi aujourd’hui) et au cours de l’interview je leur dis que nous faisions une levée de fond, alors, la journaliste nous dit : « super il faudrait que tu rencontres Anthony Bourbon » je dis : « mais moi je ne le connais pas ». Je sors de l’émission, elle me répète la même chose je lui dis encore que je ne le connais pas elle propose de faire une mise en relation par mail. Je lui ai dit : « j’ai fait des kilomètres, je suis venu jusqu’ici donne-moi son numéro je l’appelle ».  J’ai essayé de l’appeler je n’arrivais pas à le joindre, je lui envoie un Sms, j’attends 5 min je le rappelle, il me dit : « c’est Chronopost ? » je lui dis : « oui oui oui c’est Chronopost, j’ai l’adresse qui s’est effacée, je n’ai que le numéro, est-ce que vous pouvez me donner votre adresse ? » À ce moment-là, j’ai allumé mon téléphone et je suis arrivé en caméra cachée à son bureau, la sécurité essaie de prendre le colis, je refuse prétextant que je ne peux le donner qu’à Anthony Bourbon. Anthony Bourbon arrive je lui donne le colis, il me dit « mais ce n’est pas pour moi ça ! », je lui dis : « Monsieur Bourbon vous avez dit aux gens de faire preuve d’audace et c’est ce que je fais aujourd’hui, je n’ai pas rendez-vous mais si vous me donnez 15 min je vous explique notre business, il me reçoit 15 min et en sortant de son bureau il m’avait signé 300.000€ d’investissement. C’est une des levées de fonds les plus incroyables que j’ai pu voir dernièrement. Et ensuite, quelques mois après qu’on ait signé avec Anthony, on passe le casting de « Qui veut être mon associé ? » mais on ne dit rien à personne. Il n’y a que Fatiha et moi qui savions, on passe toutes les étapes du casting tout se passe bien, ils nous adorent on arrive à la dernière étape, ils nous disent : « voilà on signe les papiers et vous venez tourner l’émission dans 10 jours ». Le lendemain Anthony m’appelle le matin, je lui dis : « Salut Anthony, comment tu vas ? » il me dit : « Bien mais j’ai un truc à te demander tu fais Qui veut être mon associé ? » je lui dis : « oui oui comment tu sais ? ». Il me dit : « je suis jury ».  Je lui dis : « c’est génial ! », il me dit : « Non non ce n’est pas génial, j’ai les avocats qui sont dans mon bureau, ils veulent que je leur signe comme quoi je ne connais aucune entreprise qui fait Qui veut devenir mon associé et donc faut que tu appelles la production et que tu leur racontes. Je les appelle et je leur raconte : ils me Blacklist. Ils nous enlèvent du programme : « Vous ne faites plus partie de Qui veut être mon associé ? » . Heureusement pendant la période où je t’ai dit qu’on a contacté des influenceurs on avait contacté Moundir de Koh Lanta et Moundir de Koh Lanta nous avait présenté Arthur, Arthur qui est le producteur de l’émission. Du coup, j’appelle Moundir je lui raconte ce qui s’est passé et il me dit ok. Il appelle Arthur et Arthur appelle la production, il leur dit écoutez les, c’est un beau couple, ça va être une belle histoire. La prod nous rappelle, ils nous disent ok on vous reprend et on va juste changer le jury. Tout ça, a duré 7 jours donc il nous restait 3 jours pour tout préparer : trouver les costumes, trouver qui va s’occuper de la petite alors qu’elle n’avait que 6 mois et monter à Paris. Heureusement on est passé sur le plateau tu as vu ce qui s’est passé derrière et on a explosé médiatiquement. 

Quels ont été les principaux défis que vous avez rencontrés en lançant votre entreprise de biscuiterie, et comment les avez-vous surmontés ? 

Le premier défi ça a été de trouver du cash pour se lancer Le problème en fait c’est que quand tu n’as pas de cash c’est compliqué. Comme je t’ai dit, nous on est issu de familles modestes, donc on ne pouvait pas leur demander de l’argent.  C’est ça le problème il y a beaucoup de bonnes idées qui sont étouffées par le manque de moyens.  Donc on a dû vendre notre maison pour pouvoir nous extraire de notre situation sociale mais ce n’est pas tout le monde qui a cette chance.  Nous c’est une chance qu’on ait pu capitaliser sur une maison et de pouvoir miser sur ça pour pouvoir sortir de notre zone de confort.   

Ça c’est le premier problème, le 2e problème ça a été la distribution.  A la base on ne connaîssait rien nous à la distribution, la grande distribution, les marques, les produits.  C’est pour ça que je suis allé voir les PDG directement, je suis allé les choper je leur ai fait des Pitchs pour pouvoir leur dire qui on était. J’ai fait des pitch, comme ça si je rencontre quelqu’un en 30 secondes, 10 secondes, il ne peut pas passer à côté de notre histoire, il peut plus m’oublier.  J’ai une manière de faire les choses qui fait que je te bloque, je suis tellement passionné par ce que je fais que personne ne peut m’arrêter.  Donc j’ai fait preuve d’audace.  

Il y a aussi la production.  On n’est pas des producteurs de biscuits nous, on n’y connaissait rien.  À ce moment-là on a appris sur Youtube (aujourd’hui je peux te dire que tout ce que les gens veulent apprendre, ils peuvent apprendre ça en ligne ou sur Youtube).  Nous on a regardé sur Youtube comment monter des machines, par exemple on a regardé comment ils font chez Ferrero. On prenait des captures d’écran on allait voir les fournisseurs on leur disait : « on veut ça ! ». Ils nous disait genre : « Ça c’est pour griller des insectes ! » et on achètait. Tu vois quand t’as vendu ta maison 1,00€ c’est 1€ point barre. Donc on est allé chiner partout, on a acheté du matériel de qualité mais à moindre coût. Donc en termes de problématique la production on a appris sur le tas, c’était compliqué, ensuite il y a la livraison.   

Et le réseau avoir du réseau ça c’est essentiel. La clé du business aujourd’hui pour réussir c’est avoir du réseau. Si tu connais quelqu’un qui connaît quelqu’un et qui te présente cette personne, réellement tu es beaucoup plus fort que quelqu’un qui ne connaît personne. Et du coup, on se demandait où on va se trouver un réseau? Nous on habitait à Annecy loin des vrais réseaux.  On prenait notre voiture on se faisait inviter à des soirées. On jetait les enfants chez leur grand-mère et nous, on passait notre soirée, on ne dormait pas.  On est arrivé à entrer dans les écosystèmes. On racontait notre histoire partout et les gens sont venus se plugger à nous. Mais le plus important c’est que : depuis le premier jour, tout ce que je t’ai raconté, j’ai utilisé mon téléphone. J’ai tout filmé, tout ce que je te racontais a été filmé. Et quand on a écrit le livre, chaque chose que je racontais est documenté il y a des QR Codes, chaque chose que j’ai racontée est illustrée par des vidéos. Tu ne peux pas mettre ma parole en doute. Si je t’avais raconté tout ça sans que ce soit documenté tu m’aurais mis en hôpital psychiatrique, tu m’aurais pris pour un mytho.  Un jour un journaliste je lui racontais notre histoire pour la première fois, il me regarde, il me fait : « mais c’est quoi la vraie histoire ». Je lui ai montré les vidéos lui-même il a saigné du nez, il a dit mais vous devriez le partager. Là on a commencé à partager sur les réseaux sociaux on a créé la première télé réalité de l’entrepreneuriat sur Linkedin, où tu nous suis depuis le jour 1 jusqu’à aujourd’hui. On est allé à Tunis et les gens nous ont reconnu on est venu ici au Maroc on a fait 30 minutes et il y a des gens qui nous ont interpellés.  Que tu me reconnaisses ce n’est pas important mais qu’ils viennent voir Fatiha et qu’ils disent c’est toi qui m’as donné envie d’entreprendre, mais là c’est l’extase.  C’est même mieux que de gagner de l’argent. Si je t’ai apporté ça c’est bien même mieux que de gagner de l’argent. Inspirer les autres, leur donner envie de travailler de se dépasser.  C’est comme si tes enfants te regardent et ont envie d’aller plus loin que toi mais là c’est encore mieux car ce sont des gens que nous ne connaissons pas qui viennent nous voir et qui nous disent merci. J’ai envie de pleurer regarde toi-même t’es là, t’es en vacances et tu me dis Raibed, il faut qu’on se voit, mais je te dis avec plaisir je t’accueille comme un frère. Ça me fait du bien de savoir que je t’apporte quelque chose mais tu me fais tellement de bien en venant me le dire. En me disant merci tu me tues. Moi quand j’étais jeune j’étais un vilain petit canard. On me disait tu es nul, tu n’y arriveras pas, tu es un tocard, tu vas finir homme de ménage, tu es handicapé etc. Aujourd’hui quand on me dit tu m’inspires, frère ça, ça n’a pas de prix. Le jour qui m’a vraiment marqué c’est le jour où mon père il m’a dit je suis fier de toi. Les deux seules fois c’était à la naissance de mes filles, mais en dehors de ce contexte-là, la première fois, c’est un jour, il était avec ses potes et il tenait fièrement un magazine où nous étions en couverture Fatiha et moi, alors il s’est avancé vers moi, il a sorti le magazine, il m’a regardé et il m’a dit : « Mon fils, je suis fier de toi ! ». 

Quelle a été la réaction du public face à vos créations originales ? Avez-vous rencontré des défis spécifiques pour faire connaître vos produits sur le marché ? 

Donc ça c’est une vieille histoire. Au début, on appelait ça des billes de biscuit. En premier, on a fait des packagings où y avait écrit : billes de biscuit on a balancé. Sur le packaging, on ne voyait pas le produit il y avait juste une image sur le paquet. Donc en allant sur le terrain, (parce que c’est très important d’être sur le terrain) à chaque fois qu’on présentait le produit les gens demandaient : « c’est quoi ? », on leur disait : « des billes de biscuit », il nous faisait : « mais c’est quoi des billes de biscuit ? ».  Parce que la chose essentielle à savoir c’est que quand tu crées quelque chose d’innovant il faut éduquer le consommateur quoi qu’il arrive. Si tu prends un Pépito c’est bon Pépito, ils ont déjà fait le travail pour toi, si tu prends des arachides grillées les gens ils connaissent, on a déjà fait le travail, mais quand tu as un nouveau produit il faut prendre le temps d’éduquer ton consommateur qu’il sache : C’est quoi le produit ? Quand est-ce qu’il faut l’utiliser ? et cetera. Après on a eu l’idée d’inverser juste un truc : au lieu d’appeler ça des billes de biscuit on a décidé d’appeler ça : des biscuits en forme de billes. À ce moment-là les gens ont commencé à comprendre et donc sur le packaging on a changé on a mis : des biscuits en forme de billes et les gens ont commencé à comprendre et même côté image au tout début il y avait des petits personnages et là on voulait changer pour mettre les biscuits sur le packaging. Et on a eu tous les problèmes du monde avec la boîte de Com car on y connaissait rien sur les droits sur les créations graphiques. C’est pourquoi quand tu regardes les packagings au début c’était un autre design après on a tout redéfini, voilà sinon on allait être les otages d’une boîte marketing. Et donc une petite anecdote juste avant ça on venait de signer avec un distributeur 900 magasins. Il y avait un nombre impressionnant de commande, je me suis dit bon je vais acheter du packaging pour un an et j’ai fait la commande. Déjà les palettes ne tenais pas dans l’usine il y avait beaucoup trop de palettes ensuite il y avait des erreurs sur le packaging et enfin ce qui s’est passé là, on avait changé de design et donc, c’est 30 000 € de perdu sur ces packagings et je peux te dire jusqu’aujourd’hui, Fatiha, elle m’en veux encore. 

Quels conseils donneriez-vous aux entrepreneurs en herbe qui souhaitent se lancer dans le secteur agroalimentaire ?   

Très important : ne pas faire une erreur que nous avons faite au début : on ne connaissait pas les marges. On n’avait pas une visibilité sur nos coûts de production. Combien il fallait pour faire nos produits ? Combien de personnes fallait-il pour les produire ? Combien de temps il fallait pour les faire ? Le transport… On a découvert que quand tu travailles avec la grande distribution quand tu as des retards de livraison, ils te mettent une pénalité. Quand tu ne fais pas assez de chiffres d’affaires ça s’appelle la marge arrière, ils te mettent une pénalité. S’ils veulent faire une promotion, ils t’appellent, ils te disent voilà il faut que tu fasses une réduction. Et puis quand les magasins de grande distribution font des réductions, ce ne sont pas eux qui font les réductions, mais c’est le fournisseur qui fait les réductions. Et après on vient dire merci au magasin alors que c’est le fournisseur qu’il faut remercier. Tout ça ce sont des paramètres à prendre en compte avant de se lancer tout ça doit être pris en compte dans le business model. Donc quand on démarre, il faut prendre tout ça en compte, tous les coûts, tous les frais, comme ça après, tu vas voir un expert-comptable, tu lui expliques tout et puis après tu lui demandes à combien tu dois vendre ? Lui il pourra savoir combien le produit te coûte et puis à combien tu dois vendre pour pouvoir avoir une marge qui soit en cohérence avec le marché. Si tu lances un produit avec un certain prix et une certaine marge après c’est difficile derrière de revoir ta marge.  Ça c’est le premier conseil : c’est le business model c’est très important.  

Deuxièmement tu lances un produit, dis-toi que même si une autre Personne fait la même chose ce n’est pas important. Parce qu’aujourd’hui les gens ils n’achètent pas seulement un produit mais ils achètent l’histoire qu’il y a derrière le produit.  Tu vois aujourd’hui, nous les gens ils nous connaissent plus comme Pap et Pille Fatiha et Raibed que des producteurs de biscuits. Ils savent qu’on fait des biscuits mais on a tellement raconté notre histoire, on fait tellement de choses sur les réseaux sociaux qui font qu’aujourd’hui, les gens ils adhèrent à notre entreprise. On a plusieurs canaux d’acquisition : des gens nous rencontrent en tant qu’influenceurs Linkedin, comme des créateurs de contenu LinkedIn, ils se disent : « ils sont intéressants. Qu’est-ce qu’ils font ? Ils font des biscuits je vais goûter. ». Il y en a d’autres ils regardent, ils font : « C’est quoi ces biscuits ? C’est intéressant ! C’est qui qui fait ça ? Ce sont eux, ils sont cool. » Et après on fait de l’acquisition de ce côté-là. Il y en a d’autres, ils voient la marque, ils se disent : « Je la vois partout, c’est quoi ça ? Attends je vais goûter. » Là on fait de l’acquisition organique donc on se dit que ce n’est pas seulement le fait de vendre le produit, mais de voir l’histoire autour et vraiment je pense que tout le monde peut faire du Storytelling autour de son entreprise, tout le monde a une histoire à raconter. C’est impossible de passer à côté. Tout le monde a une histoire incroyable, il suffit juste de savoir la raconter. Tous les entrepreneurs que je rencontre c’est ça que je leur dis, il faut savoir faire une introspection. Vous devez vous poser et vous dire attends, je vais faire le film de ma vie, d’où je viens ?  Qu’est-ce qui s’est passé dans ma vie de déterminant qui fait qu’aujourd’hui j’ai la personnalité que j’ai. Regarder dans notre histoire des choses qui nous ont forgé. Par exemple, moi je suis né handicapé, ça m’a touché, j’en parle. J’ai été agressé à l’école par des cons, ça m’a touché, j’aurai pu abandonner l’école. J’avais cette force de caractère qui me disais : « tu m’as fait du mal, je vais te montrer que tu as tort ».  Je ne vais pas te faire du mal je vais juste te montrer que tu as eu tort pour que demain tu viennes t’excuser de m’avoir fait du mal. Plutôt que je te fasse du mal et que tu te justifies dans ta tête du mal que je t’ai fait. Ça c’est dans mon tempérament. Tous les entrepreneurs ont une personnalité, ont vécu une histoire qui leur est propre et qui va permettre si tu la racontes de la bonne manière et que tu la mets en cohérence avec ce que tu as créé de susciter un sentiment d’empathie de susciter une identification par les personnes qui vont te regarder. Tu vois : toi et moi on est issu de deux continents différents, tu arrives à t’identifier à mon histoire car il y a des choses que j’ai vécu que tu as sûrement vécu. Et ça : le fait de toucher l’émotion et l’empathie, c’est quand même un des sentiments les plus forts au monde l’empathie. Tu as sûrement de l’empathie pour moi en me voyant pleurer en te disant purée, j’aurais pu être à ta place.  

Et ce qui est très important et le dernier conseil que je vais donner à ses entrepreneurs, c’est n’oubliez pas d’où vous venez. Tu vois toi et moi on ne se connaissait pas tu m’as écrit un message, tu n’es pas TF1 tu n’es pas M6 je m’en fous. Je te donnerai la même importance que si tu étais le président de la République. Tu as pris le temps de me parler, de me dire juste des choses gentilles, je ne te tournerai pas le dos en me disant j’ai pas le temps où que tu ne m’intéresses pas. Je donne le temps que je peux donner parce que je n’oublie pas de là où je viens. Au début personne ne voulait t’aider, personne ne voulait me donner des contacts, personne ne voulait nous faire une passe décisive et donc on s’est promis qu’on ne ressemblerait pas à ces personnes que nous dénonçions. Aujourd’hui tu veux un contact, tu veux qu’on te facilite c’est gratuit, je ne vais pas te vendre quelque chose que j’ai eu gratuitement, de toute façon je le retrouverai d’une autre manière. 

Quels sont vos projets futurs pour l’expansion de Pap & Pille ? Envisagez-vous de développer de nouveaux produits ou d’explorer de nouveaux marchés ? 

Écoute aujourd’hui Pap & Pille, on a fait tellement de choses on a tellement montré qu’on pouvait gérer la communication qu’on est devenu de bons communiquants. Les entreprises, aujourd’hui ils viennent nous voir ils nous demandent d’être consultants, ils nous demandent de leur offrir nos services, de partager notre expertise sur la communication. Nous aussi comme je t’ai dit on a créé la première télé-réalité sur l’entrepreneuriat sur Linkedin et ça a tellement fonctionné qu’on s’est dit que nous-même on était devenu un média. On a donc décidé de créer un média et nous avons décidé de nous attaquer à tout ce qui a été problématique pour nous. Ce qui a été problématique pour nous, c’est la levée de fond parce qu’il y a une barrière d’accessibilité à la levée de fond :  quoi que tu me dises, aujourd’hui que tu sois une femme, un rebeu une personne issue des quartiers défavorisés quand tu ne rentres pas au fait dans les critères de ceux qui font les levées de fond c’est très compliqué. On a donc décidé de créer une émission où on met des investisseurs dans le noir, des entrepreneurs dans le noir, la lumière est éteinte et personne ne se voit et ce qui est important ce n’est pas ce que tu es mais ce que tu fais. Des intentions d’investissement se font dans le noir, personne ne te voit mais par contre, ils peuvent te poser des questions : ça s’appelle Invest in the dark, ça va commencer à être diffusé en fin septembre on est concepteur de l’émission, on est producteur de l’émission et on a créé une boîte de production. Et donc, dans cette émission se croisent des personnes qui ont fait des grandes écoles, des personnes en situation de handicap, des personnes qui n’entrent pas dans le prototype même de l’investisseur comme certains pourraient le penser… on les cache et le plus important c’est qu’on fait une vraie expérience sociale et les entrepreneurs et les investisseurs ne se voient pas : il y a donc des gens qui investissent dans le noir, comme ça, vraiment j’adore cette émission.  

Donc pour finir Pap & Pille aujourd’hui tu as les biscuits qui sont devenus une licence, on a confié ça à un industriel qui produit et nous on touche des royalties. On a monté une boîte de production : on produit des émissions, on a un Talkshow sur l’entreprenariat en partenariat avec l’Ordre des experts-comptables, on a Invest in the Dark et on est en train de créer d’autres émissions qui vont bientôt arriver. Et on a aussi créé une société qui implante de l’intelligence artificielle dans les TPE et les PME avec un associé qui s’appelle Lillian Delaveau en leur fournissant des outils à implémenter dans leur société qui utilise de l’intelligence artificielle. On a des outils comme Ghostapp comme Ghostmail… 

Enfin, quel est le mot de la fin ? 

Le mot de la fin : les amis vous savez que c’est beaucoup plus difficile pour nous de réussir mais n’oublie jamais, même si on doit en faire 10 fois plus que les autres parce qu’on doit prouver plus, n’oubliez pas qu’après on sera des personnes qui sont dix fois meilleurs que ceux qui n’ont pas eu la chance d’éprouver la difficulté donc voyez toujours le côté positif de la chose. Vous allez voir que sur le marché du travail des gens aussi résiliants que nous, des personnes aussi motivées, c’est difficile à trouver. Donc la difficulté elle va te faire savourer la victoire derrière, ça remet du goût, ça la rend plus sucré. 

C’est vrai que la Résilience ça revient à chaque fois pour les entrepreneurs ?  

Impossible que tu ne vives pas une galère, c’est impossible. Ça ne peut pas être une ligne droite, une personne qui te dit qu’elle vit une ligne droite soit elle a beaucoup de chance, soit elle ne te dit pas la vérité !!  

À propos de l'auteur /

Expert en communication et en stratégie d'entreprise, Mohamed El Habib Ndiaye est Rédacteur en chef du magazine Croissance et aussi Directeur associé de Grow Hub Sarl.

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